La 1e fois que mon homme m'a emmenée chez Pierre Gagnaire, il m'avait fait croire qu'on allait déjeuner au V de l'hôtel George V. Pas mal du tout. Il avait prévu qu'on y aille en métro pour ne pas avoir à donner d'adresse à un taxi, et en sortant de la station George V, il m'emmène à l'opposé du George V pour prendre l'apéro avant me dit-il. Il était déjà presque 13h : étrange, mais je le suis.
Nous arrivons devant l'entrée d'un hôtel, mais entrons par la porte d'à côté. Etrange endroit pour prendre l'apéro, on dirait plutôt un restaurant. Le cadre est moderne, rien à voir avec celui du V. Est-ce qu'il ne serait pas en train de m'arnaquer ?
On nous installe sur une vaste table ronde et on nous apporte les cartes des menus. La page de couverture met immédiatement fin à mes interrogations, car je découvre ceci :
Vendredi 22 juin 2012, c'était ma 3e fois chez Pierre Gagnaire. Et comme les 2 fois précédentes, j'ai eu cette sensation qu'il y a Pierre Gagnaire, et qu'il y a les autres. Je vous embarque dans cet incroyable voyage...
(de nombreux produits ont des noms inconnus pour le commun des gourmets, alors je vous propose de petites explications sous les photos ou en cliquant sur les liens proposés)
Mises en bouche
Au centre : Salade de fruits pastèque, banane, fruit du dragon (original et osé pour une mise en bouche, mais cohérent au goût)
A droite : Rouleau de lard de colonata, noisette grillée (quel goût, mon dieu, quel goût !!)
Vous excuserez ensuite ma mémoire de poisson rouge qui n'a pas retenu le reste...
Croustillants trempés dans de l'huile d'olive ultra parfumée, côte de romaine et crème d'anchois, croustillant meringué
Pain des mendiants aux noisettes et pistaches de Sicile
Assortiment de 3 pains : pain tradition, pain à la chataigne et pain au lait ; accompagnés de beurre demi-sel et beure aux agrumes (pamplemousse et citron)
Printemps végétal : des légumes, des fruits, des pousses, des fleurs, du vin Muscat des Beaumes-de-Venise.
Radis, carottes, petis pois, physallis, framboise... SUBLIME !
avec un sorbet framboise, puis ce même sorbet recouvert d'une sauce aux herbes...
Cette entrée a été servie lors d'un repas orchestré par Pierre Gagnaire pour 600 personnes à l'occasion du festival de Cannes 2012.
L'accueil particulièrement enthousiaste qu'elle a reçu à cette occasion lui a valu d'être reprise dans le menu dégustation du Balzac.
J'ADORE, J'ADORE, J'ADORE !
Lac léman : mousseline de brochet au savagnin, grenouille façon Poulette ; (à gauche)
flan d'ortie, salade de champignons de Paris. (au centre)
Tranche d'omble-chevalier voilée de lard de colonnata, côtes de blettes aux pignons (à droite)
Le premier plat m'avait déjà soufflée. Celui-ci n'a rien à voir (et c'est ça qui est bon), mais tout aussi divin / surprenant / kiffant !!!
Les cuisses de grenouilles sont desossées pour permettre à l'esprit de se concentrer sur les saveurs intenses plutôt que sur la chasse à la chair de cuisse de grenouille.
Le savagnin est un cépage (c'est à dire un type de plant de vigne) à petites grappes vertes ou jaunes. Il donne de grands vins blancs de garde, puissants, complexes et riches en alcool, tout en conservant une bonne acidité. Il trouve son emploi idéal dans l'élaboration du vin jaune (Jura).
La sauce poulette est une sauce à base notamment de fond de volaille, jaunes d'oeufs, crème fraîche, persil, citron, et parfois champignons.
On nous a annoncé de la féra du lac Léman plutôt que de l'omble-chevalier, un autre trésor de là-bas.
Carabineros au curry doux Madras, piquillos ;
fondue de pamplemousse et céleri-rave à la sève de tikul, râpée de chou-fleur ;
quartiers d'avocat brûlés.
Une jolie escapade exotique pour ce plat, bien que j'aie moins adhéré aux saveurs. Intéressante association du pamplemousse au piquillos cela dit.
Si j'avais du retirer un plat du menu, ç'aurait été celui-ci. Mais attention, il reste à la hauteur d'une entrée de 3*.
Le carabinero, aussi appelé gambon écarlate, est une très grosse crevette écarlate.
Crémeux d'araignée de mer, chair de tourteau, amandes coquillages et cristes marines.
Consommé iodé, velouté de brebis.
Un nouveau WAOUH ! Certes, le visuel n'est pas des plus jolis, mais les goûts, les textures, l'audace (velouté de brebis : quelle mouche avait donc piqué Pierre ce jour là ?!?) sont superbes.
Etuvée de girolles, mousserons et poulpe à l'omiza,
fleur de courgette au vieux Comté ;
rattes de l'île de Ré au belotta.
Rien à dire, le voyage continue avec des girolles au bon goût de girolles (ça parait simple, mais ce n'est pas donné à tout le monde d'en avoir de si belles et de faire ainsi ressortir leur goût), du poulpe à la texture parfaite...
Sériole enrobée d'algue - coeur de thon rouge de Méditerranée (issu de la pêche raisonnée) ;
Rouget de roche au vadouvan - tripes de morue.
Artichauts poivrades - piments de Guernica - anchois demi-sel.
Des poissons évidemment d'excellente qualité et parfaitement cuits. Et une belle découverte : les tripes de morue...
La sériole est un poisson de mer, dont le poids peut parfois dépasser les 100 kg.
Le vadouvan est un mélange d'épices d'Inde.
Un petit tour dans les cuisines avec Pierre Gagnaire avant de passer à la viande. Très très sympa le grand chef !
Rond de veine de veau fermier semi confit à l'origan,
foie gras de canard rôti ; oseille à la moutarde Fallot,
mange-tout et aubergine croustillantes.
Sirop de betterave bigarreau.
Même l'assiette vide était jolie !
Les fromages
Anneau de Vic-Bilh, infusion clarifiée de rhubarbe à l'épine-vinette.
L'anneau de Vic-Bilh, fromage qui se marie incroyablement bien avec la rhubarbe en 2 façons : J'ADORE, J'ADORE, J'ADORE !
Toast Melba de Tamié, pâte de sésame, mangue et pomme verte.
Fourme d'Ambert, feuilles de capucine saupoudrées de stévia.
Mignardises avant dessert
Jus de fruit de la passion, courgette, pomme d'amour tandoori
Que d'audace et que de goût ! Le tandori dans un dessert, c'est une très très belle idée quand c'est, comme ici, maîtrisé à la perfection.
Fraises des bois, coulis de poivron.
Association plus ou moins déjà vue (je ne sais pas qui en est l'inventé), qui reste très agréable.
Glace vanille sur un demi macaron, céleri-rave et truffe d'été en très fins bâtonnets
Du céleri et de la truffe dans un dessert, cela ne m'aurait pas forcément attirée de prime abord. Sauf que là... Que c'est bon, que c'est bon !!!
Un dessert au chocolat avec pana cotta café que j'ai oublié de photographier (en haut à gauche)
Sorbet citron-citronnelle
Idéal pour repartir tout frais et tout léger, sans être ballonné.
Ce que j'aime chez Pierre Gagnaire, c'est que tout est grand, des mises en bouche au dessert.
Pas de petits points inutiles, pas de fioritures. Tout se qui est dans l'assiette sert le plat et son équilibre. Certains plats se prêtent mieux à un joli visuel, d'autres moins ; mais le goût lui, est toujours là.
Bref, un déjeuner d'exception... j'ai déjà envie d'y retourner !